Afrique du sud
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Comme le reste de l’Afrique, un des principaux objectifs de la réforme des télécoms au début des années 1990 en Afrique du Sud a consisté à ouvrir le marché des télécoms aux nouveaux venus, en particulier aux fournisseurs de services mobiles, aux opérateurs de réseau, aux fournisseurs de service internet (FSI) et aux fournisseurs de réseaux de données. Il s’agissait en premier lieu d’améliorer l’accès abordable aux télécommunications dans l’intérêt du développement socioéconomique. En 2006, le Ministère des communications, responsable des politiques de télécommunication et de communication en Afrique du Sud, a annoncé son plan stratégique de trois ans visant notamment la réduction du coût des communications (Esselaar et autres, 2006, p. 12). Pourtant, l’accès aux communications et leur coût élevé restent problématiques en Afrique du Sud.
C’est dans ce contexte que ce rapport souligne la croissance et l’utilisation de la téléphonie mobile comme la technologie adaptée à l’Afrique du Sud. Compte tenu de la complexité du domaine, le rapport ne présente qu’un instantané de certaines utilisations innovantes de la technologie mobile dans le pays.
En 2001, le nombre des abonnés à la téléphonie mobile en Afrique a dépassé le nombre des abonnés au fixe. Selon la African Telecommunication/ICT Indicators 2008, le nombre des abonnés au mobile en Afrique a considérablement augmenté ces dernières années. En 2007, le continent africain comptait plus de 60 millions de nouveaux abonnés et les téléphones mobiles représentaient 90 % des abonnements au téléphone (UIT, 2008).
L’Afrique reste la région où le taux de croissance annuel des abonnés au mobile est la plus forte. Au début de 2008, il y avait plus de 250 millions d’abonnés sur le continent. La pénétration du mobile est passée de 50 personnes au début du siècle à presque un tiers de la population aujourd’hui. Les abonnés au mobile sont également mieux répartis sur le continent. En 2000, l’Afrique du Sud représentait plus de la moitié des abonnements au mobile en Afrique alors qu’en 2007, presque 85 % étaient situés dans d’autres pays (Goldstuck, 2006).
En Afrique du Sud, le mobile est devenu le moyen téléphonique privilégié depuis son introduction en 1994. Parallèlement, le nombre d’abonnés au fixe a chuté de plus de 10 % par rapport à 2000. Selon Arthur Goldstuck (2006) de World Wide Worx, cette situation est le résultat direct des trois grands facteurs:
- Le déploiement désastreux des lignes fixes par Telkom
- Les options limitées offertes par Telkom pour les lignes fixes
- Le coût élevé de la location des lignes fixes.
Alors que Telkom a respecté la lettre de la loi en ce qui concerne ses obligations de service universel fixées en 1997, à savoir créer 2,8 millions de lignes en cinq ans, il en va autrement de l’esprit de la loi. En 2002, Telkom avait déconnecté 40 % des 2,1 millions de lignes qu’elle avait installées au cours des quatre années précédentes, surtout pour des raisons de non-paiement (ou de coûts trop élevés).
Le marché du mobile sud-africain est dominé par deux opérateurs, Vodacom et MTN, qui ont obtenu leur licence en 1993. Un troisième fournisseur, Cell C, s’est vu octroyer une licence en 2001.
À la fin de 2007, Vodacom avait 24,3 millions d’abonnés en Afrique du Sud et une clientèle totale de 33 millions d’abonnés pour ses réseaux en Afrique du Sud, en Tanzanie, en République démocratique du Congo (RDC), au Lesotho et au Mozambique. Sa part de marché est de 56 % en Afrique du Sud et sa clientèle est composée de 3,4 millions d’abonnés à contrat, 20,8 millions d’abonnés prépayés et un peu plus de 100 000 téléphones communautaires (Vodacom, 2008).
Pour sa part, MTN compte 14,8 millions d’abonnés en Afrique du Sud, mais une clientèle totale de 61,4 millions d’abonnés pour ses 21 filiales en Afrique et au Moyen-Orient. MTN a une part de marché d’environ 36 % en Afrique du Sud et sa clientèle est composée de 2,5 millions de clients à contrat et 12,3 millions d’abonnés prépayés[1].
Cell C exerce ses activités uniquement en Afrique du Sud et comptait 4,8 millions d’abonnés à la fin de 2007 (Guest, 2008).
Malgré l’accès généralisé, l’Afrique du Sud et les autres pays africains doivent se demander comment adapter et optimiser la croissance et l’innovation dans la technologie du mobile à l’appui de projets de développement particuliers.
Étant donné que deux Sud-africains sur trois possèdent un téléphone mobile, ces appareils sont les moyens de communication les plus faciles et les moins coûteux et beaucoup plus généralisés que l’internet – une technologie totalement adaptée au contexte. Par conséquent, les particuliers et les organisations utilisent le mobile pour surveiller les élections, trouver de l’argent, soutenir les campagnes de plaidoyer et encourager le journalisme citoyen.
Le mobile sert également à combler le fossé numérique dans les pays en développement à un rythme beaucoup plus rapide que la plupart des autres interventions. Il dépasse les frontières socioéconomiques et culturelles et révolutionne la façon dont les gens s’organisent et font des affaires. Les mobiles changent la façon de communiquer de même que le fonctionnement de la société civile.
Le succès du mobile, largement attribuable à la concurrence, fait naître de nouveaux services comme la recharge prépayée par micro-paiement, l’itinérance interrégionale forfaitaire et l’adoption d’applications de commerce mobile.
Les services bancaires et les paiements mobiles à l’échelle internationale attirent l’attention du secteur bancaire et des opérateurs de mobile. Il s’agit d’une convergence de deux secteurs très puissants qui offre un outil généralisé et accessible pour la prestation de services bancaires, de paiements et autres services financiers. Les transactions mobiles comportent un certain nombre d’avantages par rapport aux méthodes traditionnelles car elles éliminent les contraintes géographiques et offrent des avantages comme le caractère immédiat, la sécurité et l’efficacité. En Afrique du Sud, 31 % des personnes qui n’ont pas de compte bancaire ont un téléphone mobile et 17 % y ont accès.
En juin 2008, la Commission de la concurrence a publié un rapport du Banking Enquiry Panel présidé par le juge Thabani Jali. Le groupe d’experts a présenté 28 recommandations pour renforcer la concurrence dans le secteur bancaire et faire baisser les coûts, dont neuf portent plus précisément sur le système national de paiement (SNP) et cinq directement sur le réseau des guichets automatiques. La recommandation de la commission visant l’ouverture de l’accès au SNP est considérée comme un catalyseur dont a besoin le secteur des paiements mobiles pour que la majorité de la population ait accès aux transactions en ligne (Vecchiato, 2008).
Selon Leon Perlman, président de la Wireless Application Service Providers Association, les recommandations concernant l’ouverture du SNP correspondent à des initiatives semblables dans d’autres pays en développement pour offrir des services bancaires et de paiement abordables, n’importe où, à l’aide des téléphones mobiles (Vecchiato, 2008).
Compte tenu de l’énorme potentiel de la technologie mobile pour transformer le secteur bancaire en Afrique du Sud, un certain nombre de fournisseurs de service sont déjà actifs dans ce domaine.
Wizzit offre une solution de services de paiement mobile sûre et efficace aux personnes qui n’ont pas de compte bancaire ou ont du mal à accéder à des services bancaires. Ce produit est un compte bancaire à faible coût utilisant le téléphone mobile pour les paiements, les transferts de personne à personne et les achats prépayés. En novembre 2007, la Société financière internationale (SFI), membre de la Banque mondiale, a annoncé qu’elle fera l’acquisition de 10 % de Wizzit afin d’étendre ses services bancaires aux pauvres (ITWeb, 2007).
Une autre compagnie sud-africaine, Fundamo[2], développe et déploie des applications de service bancaire mobile qui permettent de sécuriser les transactions financières sur les téléphones mobiles. Compte tenu de la progression des services bancaires mobiles sur l’ensemble du continent africain, Fundamo a déjà offert des solutions et des services de soutien aux fournisseurs en Afrique du Sud, au Kenya, au Botswana, au Zimbabwe, en Zambie et en RDC. La compagnie se lance également sur d’autres marchés comme le Brésil dans le cadre d’un accord de licence de revente avec la compagnie de solutions bancaires brésilienne BSI Tecnologia. Cela permettra à BSI de vendre à Fundamo une technologie mobile sur le marché brésilien. Fundamo a également conclu un partenariat global avec Accenture, une compagnie de consultation en gestion et de services technologiques, pour accélérer l’adoption mondiale du portefeuille mobile.
Ces dernières années, toutes les grandes banques commerciales d’Afrique du Sud ont adopté les solutions bancaires mobiles afin d’offrir ces services aux personnes sans compte bancaire et en s’appuyant sur l’omniprésence du téléphone mobile.
Il existe un certain nombre d’autres exemples d’application de la technologie mobile en Afrique du Sud.
M4Girls est un projet pilote lancé par Nokia de concert avec le ministère de l’Éducation et le réseau Mindset. Il utilise les téléphones mobiles Nokia 6300 qui contiennent des ressources éducatives afin d’aider les filles en 10e année d’école à améliorer leur apprentissage des mathématiques. Outre le projet pilote initial consacré aux mathématiques, Nokia et Mindset développent un contenu numérique dans d’autres matières importantes comme l’anglais et les technologies de l’information (ITWeb, 2008).
SMSweb offre un service SMS illimité aux écoles pour pouvoir envoyer des messages importants directement aux parents. Environ 250 écoles du pays utilisent déjà le service. En 2007 plus de 4 millions de messages ont été envoyés aux parents.
FishMS est un service SMS de la Southern African Sustainable Seafood Initiative qui renseigne les consommateurs sur l’état des stocks de poisson dans le monde. Les utilisateurs indiquent le nom du poisson qu’ils envisagent d’acheter et savent immédiatement si le poisson a été pêché dans une optique de conservation ou s’ils devraient y penser à deux fois avant de l’acheter[3].
MobiDic, abréviation de Mobile Dictionary, est un service qui permet d’accéder à un dictionnaire sur un téléphone cellulaire. Ce projet a été lancé par SABC Education, une filiale du radiodiffuseur d’État en partenariat avec la Gauteng Economic Development Agency (GEDA) et Biza Telecoms, une compagnie de technologies de l’information et de la communication pour l’autonomisation des Noirs. L’objectif de MobiDic est d’aider les utilisateurs à améliorer leurs compétences linguistiques et leur capacité en lecture et écriture. En envoyant simplement un mot pour lequel il veut une explication à un numéro de code, l’utilisateur reçoit instantanément une définition par SMS[4].
SIMpill est une solution de surveillance sans fil et de soutien aux malades chroniques. Elle incorpore les technologies sans fil pour la surveillance des patients ayant une maladie chronique afin de leur rappeler de prendre leurs médicaments. Elle a également pour but d’aider les organismes de santé à être plus efficaces et rentables dans leurs soins[5].
MXit est un service de messagerie instantané qui réduit le coût d’un SMS, allant de 80 cents pour envoyer un seul mot comme « hello », jusqu’à 100 000 fois moins, c’est-à-dire 0,0008 cents. Plus de 6 millions de Sud-africains – surtout les moins de 25 ans – utilisent MXit. Les nouveaux utilisateurs s’abonnent à un rythme de 10 000 par jour. Il n’y a pas de frais d’installation ni de participation, mais les utilisateurs ont besoin d’un téléphone mobile qui puisse utiliser le service général de paquets radio (GPRS) ou la technologie de troisième génération. Une fois connecté au service, il est possible de communiquer avec d’autres utilisateurs de MXit et avec les groupes de discussion en ligne, comme MSN Messenger, ICQ, AOL Messenger et Jabber. Les deux parties doivent être connectées au réseau MXit pour envoyer un message. Du fait que l’on ne paie que les données ou l’information envoyée ou reçue et non l’accès à l’internet, l’utilisation de MXit est très peu coûteuse[6].
Call Me permet aux abonnés de Vodacom d’envoyer jusqu’à cinq messages gratuits par jour en demandant un rappel du destinataire. Ce genre de service répond à un besoin des consommateurs qui, auparavant, avertissaient la personne à laquelle ils souhaitaient parler en faisant sonner le téléphone une fois et en raccrochant. Call Me officialise le processus et contribue à réduire le trafic réseau en limitant le nombre d’appels prématurément déconnectés[7].
Smile Communications fait l’essai d’un service qui consiste à donner aux clients un numéro de téléphone en propre même s’ils ne possèdent pas d’appareil. Ils reçoivent un numéro de téléphone gratuit et une boîte vocale. Des essais ont lieu dans la ville de Gamalakhe, près de Port Shepstone dans le KwaZulu-Natal. Les clients recevront un code PIN sécurisé pour pouvoir utiliser n’importe quel téléphone Smile. Une fois connectés, ils pourront faire des appels à faible coût et utiliser une boîte vocale avec extraction gratuite des messages. Le fait d’avoir un numéro personnel permet d’être contacté directement, même si l’appelant doit laisser un message, à moins que l’utilisateur ne se connecte au téléphone Smile à un moment prédéterminé pour répondre à l’appel (Stones, 2008).
Ce service est une variante d’une autre initiative qui avait pour but de réduire le coût des télécoms en exigeant des opérateurs de cellulaire de distribuer gratuitement 4 millions de cartes SIM aux plus pauvres des Sud-africains. Vodacom, MTN et Cell C ont accepté de donner les cartes en échange d’un accès au spectre, mais le projet a échoué pour des raisons administratives et techniques. Les cartes étaient inutiles sans appareil de sorte qu’il fallait emprunter un téléphone. Elles donnaient en outre un numéro de cellulaire, mais elles n’étaient pas chargées, si bien que les utilisateurs devaient quand même payer un tarif de détail élevé pour du temps réseau prépayé.
Il est clair que le marché du mobile et le potentiel de la technologie mobile pour améliorer l’accès et les communications sont très prometteurs en Afrique du Sud et pour d’autres pays en développement. Mais malgré la croissance phénoménale du mobile, il reste encore des obstacles à son adoption. Le prix élevé et le fait que la plupart des téléphones anciens et bon marché ne sont pas adaptés aux principales technologies en font partie.
En juin 2008, la Independent Communications Authority of South Africa (ICASA) a publié des règlements visant à empêcher les consommateurs d’être bloqués dans des contrats à long terme avec les opérateurs mobiles – une critique de longue date des réseaux. Selon le nouveau règlement, les consommateurs pourront choisir la durée de leur contrat qui ira de 6, 12, 18 à 24 mois. Le nouveau règlement est entré en vigueur le 17 août 2008.
Cette mesure, ainsi que les progrès réalisés sur le plan des politiques et de la réglementation pour promouvoir tant la concurrence qu’une tarification et des licences plus abordables, témoigne de la nécessité reconnue de soutenir la croissance du secteur mobile dans le pays.
Cape Argus, SMS system helps schools, parents, Cape Argus, 30 juin, 2008.
Voir à: www.capeargus.co.za/?fSectionId=3571&fArticleId=vn20080630055754502C368889
Esselaar, S., Gillwald, A. et Stork, C., South African Telecommunications Sector Performance Review 2006, LINK Centre Public Policy Research Paper No. 8, 2006.
Fundamo: www.fundamo.co.za
Goldstuck, A., The Hitchhiker’s Guide to Going Mobile: The South African Handbook of Cellular and Wireless Communication, Cape Town, Double Storey Books, 2006.
Guest, K., Cell C's turnaround proves profitable, ITWeb, 16 avril, 2008.
Voir à: www.itweb.co.za/sections/financial/2008/0804161031.asp?O=FPTOP&S=Telecoms&A=TEL
UIT (Union internationale des télécommunications), African Telecommunication/ICT Indicators 2008: At a Crossroads, Genève, Union internationale des télécommunications, 2008.
ITWeb, World Bank arm buys into Wizzit. ITWeb, 21 novembre, 2007. Voir à: www.itweb.co.za/sections/business/2007/0711211042.asp?S=IT%20in%20Banking&A=ITB&O=FRGN
ITWeb, Mobile phones to teach Maths, ITWeb, 8 avril, 2008.
Voir à: www.itweb.co.za/sections/telecoms/2008/0804081343.asp?A=CEL&S=Cellular&O=FPPN
MTN: www.mtn.co.za
Stones, L., Free cellphone numbers, Business Day, 22 avril, 2008.
Voir à: mybroadband.co.za/news/Cellular/3566.html
Vecchiatto, P., Commission opens mobile payment industry door, ITWeb, 26 juin, 2008.
Voir à:www.itweb.co.za/sections/financial/2008/0806261040.asp
Vodacom, Vodacom results for the period ended December 31, 2007. Communiqué, 2008.
Voir à: www.vodacom.co.za/mccrdetail.do?id=1084&action=detail
[1] MTN: www.mtn.co.za
[2] Fundamo: www.fundamo.co.za