Sénégal

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APC West and Central Africa ICT4D Network Coordinator

 

Introduction

En juillet 2008, la loi régissant le développement d’une société de l’information au Sénégal a été signée par les députés de l’Assemblée nationale. Cette législation prévoit:

  • Une loi qui établit les principales tendances de la société de l’information au Sénégal en complétant la loi actuelle concernant les technologies de l’information et de la communication (TIC)
  • Une loi sur la cybercriminalité
  • Une loi portant sur la protection des renseignements personnels
  • Une loi connexe sur les transactions électroniques (commerce en ligne).

Cette nouvelle loi est la preuve de la volonté politique du Sénégal de créer une société de l’information inclusive à l’avantage de l’ensemble de la population.

Situation du pays

Au Sénégal, les télécommunications contribuent largement à l’amélioration des indicateurs macro-économiques et au développement de l’activité socioéconomique, soit 8 % du produit intérieur brut (PIB). Le secteur a connu une croissance de 22,5 % en 2006. Alors que le marché de la téléphonie fixe s’est bien maintenu, le sous-secteur de l’internet a connu une croissance de 60,4 % la même année.

Le réseau de télécommunication moderne du Sénégal attire les entreprises qui souhaitent établir une présence en Afrique. Le marché intérieur est petit mais offre une main-d’œuvre bon marché, de faibles coûts opérationnels et une infrastructure de télécommunications moderne et abordable.

Les services mobiles existent depuis 1996 et la concurrence entre les sous-secteurs a commencé deux ans plus tard. Depuis l’instauration de la concurrence, le nombre des abonnés au mobile a considérablement augmenté, les lignes cellulaires représentant actuellement plus de 85 % de toutes les lignes téléphoniques. L’usage de l’internet a doublé chaque année depuis 2003, lorsque les services de ligne d’abonné numérique asymétrique (ADSL) ont été introduits. Il existe déjà des investissements importants dans l’infrastructure de fibre optique. La pénétration de la large bande est encore relativement faible, ce qui offre des possibilités intéressantes aux entreprises de TIC qui cherchent à obtenir de nouvelles licences[1].

À la fin de 2006, on comptait une compagnie de télécommunication nationale, SONATEL, deux compagnies de téléphonie mobile, TIGO et Orange Sénégal (filiale cellulaire de SONATEL) et 412 hébergeurs internet. Une nouvelle licence a été accordée à la Sudan Telecommunications Company (SUDATEL) qui commencera à offrir prochainement des services fixes, mobiles et internet.

Politique et régulation

En 1985, les télécommunications ont été complètement réformées au Sénégal. Les activités des postes et des télécommunications de l’Office sénégalais des postes et des télécommunications ont été séparées et la SONATEL a été créée[2]. En 1996, une nouvelle loi fixait la politique régissant le secteur des télécommunications. En 1997, le capital de la SONATEL était partiellement privatisé, 42,33 % étant détenu par France Télécom, 27,67 % par l’État, 20 % par des actionnaires publics et 10 % par les employés[3].

Cette privatisation n’a pas changé radicalement le secteur des TIC puisque SONATEL a continué d’exercer un contrôle sur tous les services de télécommunication. En 2004, son monopole a pris fin, mais en 2006, le second opérateur national (SNO) n’avait toujours pas été nommé. Le Sénégal s’est engagé en vertu de l’Accord de base sur les télécommunications de l’Organisation mondiale du commerce à établir une structure réglementaire favorisant une concurrence juste et saine entre les opérateurs.

Accès universel

Au Sénégal, l’accès et les services universels sont un des rares domaines privatisés. SONATEL offre un type de franchise aux petits opérateurs pour installer un téléphone payant, le fax, l’internet et d’autres services d’accès aux communications dans les zones rurales. Cette mesure semble donner de bons résultats dans les villages en créant un accès local aux TIC et encourage l’entrepreneuriat entre les petites entreprises et les exploitants des télécentres. Le tableau 1 montre les données sur l’usage des TIC en 2006.

 

Tableau 1 : Usage des TIC en 2006

Service

Nombre d’utilisateurs

Télédensité

(Pop. 11,9 millions)

Lignes fixes

266,600 (2005)

2.24 %

Mobile

2,218,906

18.6%

Internet

540,000

5%

 

Participation

Les télécommunications rejoignent les régions les plus reculées du pays. Grâce à un réseau moderne et une infrastructure sûre, même les petites et moyennes entreprises peuvent survivre sur le marché sénégalais. Voici quelques exemples de programmes de TIC et d’organismes qui exercent leurs activités dans le pays.

Une entreprise moderne qui offre aux agriculteurs les prix du marché en temps réel pour leurs récoltes grâce au téléphone mobile a obtenu deux prix importants de TIC africains.Manobi-Sénégal a été nommée l’entreprise la plus innovante et a été également la grande lauréate duAfrican ICT Achievers Awards. Le fondateur et PDG de Manobi, Daniel Annerose, a lancé la compagnie de services internet et mobile avec l’aide de l’initiative Acacia du Centre de recherches pour le développement international (CRDI), de la compagnie de communication Alcatel et de SONATEL.

Les agriculteurs des régions éloignées du Sénégal ont reçu des téléphones cellulaires avec protocole d’application sans fil (WAP) leur permettant de se connecter à l’internet pour vérifier les données du marché et comparer les offres des acheteurs locaux. En moyenne, les abonnés ont gagné environ 15 % de plus pour leurs produits, après déduction des coûts, y compris le prix du service de Manobi. La contribution d’Acacia a consisté à créer une méthode de collecte de l’information sur le marché et de tester l’acceptation du système par les agriculteurs. La Banque mondiale a également aidé Manobi à étendre le réseau cellulaire en ajoutant les données sur le marché du secteur de la pêche.

Les télécentres ont également une forte incidence. SONATEL a lancé les quatre premiers télécentres à Dakar en 1992. Dix ans plus tard, on comptait plus de 15 000 télécentres privés au Sénégal, plus que dans n’importe quel autre pays d’Afrique. Depuis 1997, SONATEL n’offre plus les services de téléphonie publique mais a accordé des licences aux télécentres qui sont exploités par des petites entreprises. La plupart de ces centres offrent seulement l’accès au téléphone public, mais un nombre croissant possède également des fax, des ordinateurs et donnent accès à l’internet. Les télécentres représentent jusqu’à 30 % des recettes annuelles de SONATEL. Pour favoriser encore la croissance, SONATEL leur offre un rabais de 40 % sur les services. Dakar compte déjà près de 6 000 télécentres et plus de 30 % sont situés dans les régions rurales. Ils représentent plus de 7,5 % des lignes fixes de SONATEL.

Le Sénégal a bénéficié de la Digital Freedom Initiative (DFI). Les bénévoles de la DFI travaillent avec les entreprises étatsuniennes et le gouvernement sénégalais pour mettre en œuvre des initiatives internet, comme le système de paiement électronique et la formation de base en technologie de l’information pour les commerçants sénégalais.

La DFI a également créé diverses ressources de formation faisant appel aux TIC qui ont servi à améliorer la gestion des cybercafés, la gestion des affaires et l’accès au marché pour des dizaines de petites et moyennes entreprises. La DFI cherche maintenant à tirer partie de ses investissements dans ces ressources pour en généraliser l’utilisation dans le pays. Le programme est géré par le gouvernement.

L’Association sénégalaise des professionnels des technologies de l’information et de la communication (SITSA) est la première association nationale à représenter les industriels et les professionnels de l’information au Sénégal. La SITSA a été créée en 2003 par des représentants de la plupart des entreprises de services et des technologies de l’information du Sénégal. Elles ont décidé de collaborer pour créer une nouvelle association chargée de promouvoir le secteur des TIC aux niveaux national et international.

Le commerce en ligne en est à ses tout débuts au Sénégal. La première expérience du pays dans ce domaine a été lancée par Trade Point, une initiative de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) pour faciliter le commerce international. Trade Point utilise l’internet pour favoriser des rencontres entre entreprises sénégalaises et partenaires internationaux.

En septembre 2008, kheweul.com, une compagnie de TIC, a lancé un projet créant 200 sites Web pour des musiciens en faisant appel à l’expertise locale.

La SONATEL et la Gambia Telecommunications Company (Gamtel) ont lancé une nouvelle carte prépayée appeléeCarte Sama Yai, destinée aux Sénégalais qui vivent en Gambie. La carte leur permet de communiquer avec leurs familles au Sénégal à un prix abordable.

Le Groupe pour l’étude et l’enseignement de la population (GEEP), une organisation sans but lucratif, a créé un projet intitulé Cyberespaces Jeunes. Ce projet vise à contribuer à un réseau de clubs d’éducation à la vie familiale qui sont actifs dans les écoles secondaires. Le projet offre l’accès au réseau afin d’améliorer la communication entre les membres des clubs. Il sert également de véhicule pour la distribution de différents outils éducatifs liés à la santé reproductive, la gestion de l’environnement, la population, etc. Il existe 20 clubs actifs dans différentes parties du Sénégal. Le programme Acacia du CRDI finance le projet et des liens ont été établis avec le programme World Links.

Le ministère de l’Éducation et SONATEL ont signé un accord qui établit des modalités préférentielles pour l’accès internet, de manière à abaisser les coûts pour les établissements d’enseignement. Les rabais varient selon le type de connexion mais peuvent aller jusqu’à 75 %. Les coûts d’installation sont également réduits. SONATEL est directement responsable de la facturation aux écoles.

Volonté politique et rôle du président

Le président du Sénégal, Abdoulaye Wade, est le champion des TIC dans son pays. C’est M. Wade qui a lancé l’idée d’un fonds d’accès universel au Sénégal et qui supervise l’initiative de gouvernement en ligne.

Le Sénégal a lancé en trois étapes son initiative de gouvernement en ligne, qui implique la mise en réseau de 63 centres administratifs, la connexion de 35 capitales de département, l’expansion du réseau à l’échelle du pays et l’intégration d’applications de gouvernement en ligne à valeur ajoutée.

Le Sénégal est divisé en 11 régions et 35 départements et compte 11 000 villages répartis dans tout le pays. Ils ne sont pas encore connectés par un intranet gouvernemental, d’où un coût élevé des communications entre les différentes entités. Le déploiement des services de gouvernement en ligne permettra de réduire les coûts de fonctionnement intergouvernementaux, et avec l’application des services à valeur ajoutée et de gouvernement en ligne, d’établir un gouvernement efficace et rentable qui sera plus accessible à la population.

L’intranet gouvernemental devrait transmettre la voix, l’image et les données. Le réseau est établi sur une boucle de fibre optique qui relie huit nœuds principaux. Il offrira:

  • L’accès internet haut débit
  • La téléphonie par protocole internet
  • Des services modernes : téléconférence, vidéoconférence et répertoire en ligne
  • Un serveur et un portail utilisant des logiciels libres ainsi qu’un outil pour améliorer la productivité et l’efficacité de tous les pouvoirs publics.
Conclusion

Même si le Sénégal possède une des meilleures infrastructures de télécommunication en Afrique et malgré toute la volonté politique du monde, cette infrastructure est largement sous-utilisée pour diverses raisons. Les prix des services sont relativement élevés en raison de l’absence de concurrence dans la téléphonie fixe internationale et l’internet, ainsi que la concurrence restreinte dans le secteur du mobile. De plus, l’innovation est limitée par la régulation qui consolide la position dominante de SONATEL. La question de la téléphonie rurale est largement négligée et la fracture numérique entre les villes et les zones rurales est toujours importante.

Les réformes n’ont jamais été conduites dans un cadre participatif. La participation de la société civile à la formulation des politiques n’a été ni active ni influente. Même lorsque toutes les parties prenantes ont été invitées à des consultations nationales de deux jours, les recommandations de la société civile n’ont pas été prises en compte dans les décisions.

Toutefois, les relations entre le gouvernement et la société civile ou le secteur privé se renforcent. Le régulateur les a inclus dans un groupe de travail mis sur pied pour gérer le fonds d’accès universel. L’objectif le plus important de la société civile sénégalaise est de faire partie de ce groupe et de plaider pour des changements dans les orientations politiques au bénéfice des libertés citoyennes et de l’utilisation efficace des TIC pour le développement.

Références

ADIE (Agence de l'Informatique de l'État):www.adie.sn

APIX (Agence Nationale chargée de la Promotion et de l’Investissement des Grands Travaux):www.investinsenegal.com

ARTP (Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes):www.artp-senegal.org

Budde Comm:www.budde.com.au

Computer Frontiers, Sub-Saharan Africa Information and Communications Technology Conference, San Francisco, États-Unis, 2007.

National Information and Communication Infrastructure (NICI) in Africa Country Profile: Senegal.

Novatech 2006 Investor Profile : Senegal.

OSIRIS (Observatoire sur les Systèmes d’Information, les Réseaux et les Inforoutes):www.osiris.sn/rubrique212.html


Footnotes

[1]Budde Comm:www.budde.com.au

[2]National Information and Communication Infrastructure (NICI) in Africa Country Profile: Senegal

[3]Novatech 2006 Investor Profile: Senegal